23 organisations adoptent la charte MIHARI
Il était une fois une pirogue nommée “MIHARI” qui s’est donnée comme mission de porter la voix de petits pêcheurs de Madagascar contre vagues et marées. Le 6 mars 2018 restera à jamais une date mémorable dans son voyage. 23 organisations œuvrant dans le domaine de la conservation dans différentes parties de Madagascar ont embarqué officiellement à son bord.
La Réunion annuelle de coordination du réseau MIHARI s’est tenue les 6 et 7 mars 2018 à l’hôtel “Le Pavé”, Antaninarenina, Antananarivo. Au cours de cette réunion ont été présentées les réalisations 2017 ainsi que les activités prévues pour l’année 2018 afin d’avoir l’implication des organisations regroupées au sein de MIHARI. Un moment a marqué cette réunion : l’adoption de la Charte du réseau qui symbolise l’affiliation officielle de ces organisations en tant que membres au sein du réseau MIHARI.
MIHARI : un des piliers de la gestion des ressources marines et côtières à Madagascar
Créé en 2012 à la suite d'une initiative qui a réuni 55 membres de la communauté de 18 LMMA à Madagascar, MIHARI a été dès ses débuts une volonté des petits pêcheurs engagés et conscients de leurs responsabilités, qui ont été appuyés par des organisations œuvrant dans la conservation marine. Cette synergie qui, à part d’impacter sur le destin des communautés de pêcheurs, représente également un grand enjeu pour l’avenir de Madagascar.
Entamant ses six ans d’existence, MIHARI a pu, grâce au soutien indéfectible de ses organisations membres et partenaires et surtout des communautés de pêcheurs à travers tout Madagascar, tracer le futur du réseau.
« MIHARI paraissait une initiative abstraite, et un peu fou, à ses débuts. Mes félicitations, parce qu’aujourd’hui nous avons abouti à quelque chose de concret. Nous souhaitons que ça se développe de plus en plus et que ça ne reste pas seulement au niveau de Madagascar mais que ça devient un modèle mondial. » confie Allison, le Directeur pays de Wildlife Conservation Society (WCS) Madagascar, organisation présente depuis les débuts du réseau.
PAGE/GIZ a témoigné son adhérence totale au réseau : « Jusqu’en 2020, à la fin du programme PAGE et au-delà, nous comptons sur la réalisation des axes stratégiques de MIHARI surtout en termes de gestion des ressources marines. Nous sommes convaincus que c’est l’initiative la plus appropriée pour assurer la pérennisation des ressources naturelles, un des objectifs du programme PAGE/GIZ.» affirme Rindra Rakotoharifetra.
Opti’Pousse Haie (OpH), représenté par Anthony Bracke, d’ajouter : « MIHARI nous a beaucoup aidé. On a des moyens assez limités et appartenir au réseau nous encourage beaucoup. Les communautés qui reviennent des évènements MIHARI sont des leaders qui sont écoutés et qui ont toute la confiance de leurs pairs.»
A part les organisations sus-citées, qui ont rejoint le réseau il y a cela des années, d’autres qui ont récemment adhéré à MIHARI ont expliqué leurs choix. Pour Durrell, Hasina Randriamanampisoa, a confié : « A part la sollicitation de nombreuses organisations, ce qui nous a le plus encouragé à intégrer le réseau, c’est la particularité de MIHARI, qui est une rare des initiatives qui fait entendre la voix des personnes délaissées, oubliées et vulnérables. »
Louvain Coopération a aussi commencé sa collaboration avec le réseau il n’y a pas longtemps, après avoir découvert l’existence du réseau à travers la coopération et les échanges avec les autres acteurs qui interviennent dans le domaine de la conservation dans la région Menabe. « Adhérer à MIHARI, c’est une plus-value pour nous et pour les communautés que nous appuyons et c’est une suite logique du travail en réseau et en synergie que nous appliquons depuis toujours dans nos méthodes de travail. » raconte Jean Patrick Masquelier.
Roger Edmond, membre du staff de Museum National d'Histoire Naturelle (MNHN) a raconté : « La première rencontre avec le réseau s’est effectué quand nous avions effectué un projet sur les Dugongs, c’est suite au Forum de Fort-Dauphin en 2017 que nous avons intégré parce que nous avions sentis que les communautés sont devenus plus engagés. Aussi, dans les motions adoptées au forum, il y a une partie entièrement dédiée à la pérennisation financière des pêcheurs. Cela a été le déclic, et nous nous sommes dit qu’il ne fallait plus attendre un instant pour adhérer au mouvement. »
MIHARI : un réseau pour le renforcement des capacités des communautés et des organisations d’appui
Les activités de MIHARI sont avant tout tournées vers les communautés. Cependant, les organisations comme Conservation Centrée sur la Communauté (C3) Madagascar ont témoigné qu’appartenir au réseau a amélioré leur façon de travailler. « Pour moi personnellement, pour C3 et ainsi que pour les communautés avec qui nous travaillons, MIHARI a beaucoup apporté. Les échanges et les formations ont renforcé nos capacités en termes d’approche et de bonnes pratiques. Ces dernières nous ont permis de réussir dans la réalisation de nos projets. L’obtention de financement n’est pas la seule garantie de l’atteinte des objectifs que l’on s’est fixés. A MIHARI, on trouve la collaboration, le partage de bonnes idées et de pratiques et surtout la solidarité. C’est ce fait son plus.» Lalarisoa Rakotoharimino, Coordonnateur du programme C3 de Madagascar et des Iles de l'océan Indien.
Pour SAGE (Service d'Appui à la Gestion de l'Environnement), Tahiana Razafindralambo scande : « MIHARI est un retour aux sources. Nous avons diversifié nos activités depuis plusieurs années, mais depuis que nous avons intégré le réseau, nous nous sommes focalisés sur notre passion et sur ce qui fait notre identité : l’écosystème marin et côtier. Aujourd’hui nous sommes plus qu’heureux que la collaboration de longue date soit concrétisée ».
« Grâce à l’intégration et la collaboration, les communautés sont de plus en plus dynamiques notamment en termes de l’application des conventions locales ou DINA. Nous souhaitons que la collaboration soit pérenne pour la protection des ressources marines de Madagascar. », a déclaré Sariaka Rakotondrazafy, de l’ONG Fanamby.
Forum National 2017 de Fort-Dauphin : un cap important pour le réseau
Dans son odyssée, MIHARI retiendra un grand tournant : c’était en juillet 2017, au quatrième Forum National, à Fort-Dauphin dans le Sud de Madagascar, où 250 participants dont 173 représentants de communautés LMMA se sont donné rendez-vous pour le quatrième Forum National MIHARI à Fort-Dauphin dans le sud de Madagascar. Camille Rabezafy, Président du Comité d’Orientation et de Soutien des Aires Protégées (COSAP) Sahamalaza, partage ses pensées : « Cela m’a particulièrement touché de voir autant de pêcheurs, qui n’ont jamais quitté leur village, voyager d’Antananarivo à Fort-Dauphin. Il est plus que nécessaire d’unir les communautés de pêcheurs longeant les 5.200 km de côte de Madagascar ».
Pour les communautés hôtes, l’émotion a également été fortement ressentie. Toky Hasina Sylvestre, de Aquatic Service, de continuer : « Avoir été l’organisation hôte d’un Forum National MIHARI est l’une des réalisations les plus gratifiantes de tous nos accomplissements. Cela a été un grand défi. Comme impact, ce forum a renforcé le dynamisme de toute la région Sud-Ouest dont principalement les communautés de pêcheurs de Fort-Dauphin.»
Pour SEED Madagascar (Sustainable Environment, Education & Development in Madagascar), qui travaille également dans la région Anôsy, dans le Sud de la Grande Ile, le quatrième Forum National a été une totale réussite. Intervenant à Sainte-Luce, une des destinations où les participants ont effectué une visite dans le cadre du forum : « Cela a été une première dans l’histoire de nos 19 ans d’intervention à Sainte-Luce ! Les communautés sont également satisfaites et honorées qu’une telle forte délégation de communautés de pêcheurs ait visité leur village. » ajoute Mbola Sylvestre.
Pour la majorité des participants, ce rendez-vous a été une grande aventure avant tout. « Nous avons effectué Sainte-Marie à Fort-Dauphin en 83 heures, soit environ 2.000km en empruntant plusieurs types de moyens de transport. Dans le fameux Karandal, ce grand bus unique en son genre, toutes les deux heures, il fallait toujours que quelqu’un demande une pause pour se dégourdir un peu.» raconte Henintsoa Ramanana de Cétamada.
Au-delà de de ces témoignages et anecdotes, tout le monde se souviendra du Forum National de Fort-Dauphin, comme un tournant historique pour le Réseau MIHARI. C’est durant ce forum que l’assemblée générale a adopté les documents officialisant le fonctionnement du réseau (stratégies, charte et structure). D’une voix unie et forte, les petits pêcheurs représentant les LMMA de tout Madagascar ont aussi adressé au Gouvernement de Madagascar des doléances touchant leurs défi et leurs préoccupations. « Cela a été fantastique de voir des représentants venant de 173 communautés se mettre d’accord sur un texte adressé aux autorités nationales. » rapporte Jean-Phillipe PALASI, Directeur Pays de l’ONG Blue Ventures. Et à José Randriamampionona de SAHI (Sehatra Ampandrosoana Haingana ny Ivom-paritra) de rajouter « Nous avons été fascinés par les communautés de pêcheurs qui se préparaient vaillamment à discuter avec les représentants du Gouvernement malgache ».
L’affiliation des organisations, juste une étape, le meilleur est encore à venir
MIHARI est désormais une mobilisation de la société civile malgache qui lutte pour un meilleur avenir des petits pêcheurs de Madagascar. C’est un mouvement en marche qui nécessite l’engagement et l’appui de nombreuses parties prenantes. Les 23 organisations membres ont témoigné de leur soutien pour le futur de MIHARI. Cela a été marqué par leur participation active à la deuxième journée de la Réunion annuelle de coordination qui s’est tenue le 7 mars 2018. Pour accueillir officiellement ses membres et collaborateurs de toujours, une autre charte sera élaborée pour les communautés de pêcheurs et pour les partenaires étatiques.
Roberto Komemo, de Reef Doctor, souhaite que les communautés soient également reconnues : « Je suis fasciné par le dynamisme régnant au sein de MIHARI. Je souhaite que les communautés LMMA se renforcent et seront de plus en plus engagés."
Vony Ramino de Asity Madagascar : « L’importance de MIHARI n’est plus à démontrer. Nos deux sites sont situés sur la côte et grâce à l’appartenance à MIHARI, nous allons renforcer notre intervention en termes de conservation marine. »
Comme vision pour l’année 2018, Mamy Rakotoarijaona, Directeur des opérations de Madagascar National Parks (MNP) souhaite : « Que MIHARI progresse et grandisse. Que les poissons grandissent en nombre et en tailles. Pour que les aire soient bien protégées et que ça ait un impact pour les communautés locales et celles environnantes. »
Selon Norotiana Mananjean, de Development and Environmental Law Center (DELC) : « L’existence de MIHARI est très importante. DELC œuvre dans le domaine des lois et législations tant dans le secteur privé que le secteur environnemental. L’âme de ce réseau est surtout ses membres qui sont passionnés et engagés. Cela nourrit notre espoir dans la gestion pérenne de la mer et de ses ressources. »
C3, comme toutes les autres organisations travaillant de près avec les petits pêcheurs de Madagascar a été convaincue qu’il est plus que nécessaire d’améliorer le niveau de vie des pêcheurs à Madagascar. « Je souhaite que le Réseau MIHARI se renforce et élargisse son impact notamment en termes de viabilité financière des communautés, un des points dans la vision de MIHARI qui me tient le plus à cœur. Que MIHARI devienne un levier pour la promulgation des lois, le renforcement des capacités des leaders LMMA et la collaboration avec les autorités ».
La Directrice pays de World Wildlife Fund (WWF) Madagascar, Nanie Ratsifandriamanana a résumé dans ses souhaits : «L’union fait la force, ensemble, on est plus forts et c’est tout à ce que MIHARI reflète. Nous souhaitons que les communautés locales, âme de cette plateforme, se renforcent et portent elles-mêmes leurs voix ».
Pour l’avenir prometteur de MIHARI, Gret, à travers l’un de ses collaborateurs, Albert Rakotonirina, a partagé son souhait : « Madagascar est entouré de mer donc il est temps que MIHARI entoure également tout Madagascar. »
Fédérer et collaborer est la meilleure des choses pour assurer un avenir durable pour les ressources marines de Madagascar. MIHARI, le réseau malgache des communautés gestionnaires de LMMA créé en 2012, est un exemple de cette mobilisation prometteur pour le développement de Madagascar à travers la gestion durable de ses ressources.
La pirogue MIHARI prône l’inclusion, l’intégrité, l’entraide, l’engagement, la responsabilité, la redevabilité, la solidarité et le partage. Pour naviguer sereinement, elle aura besoin de ses membres pour pagayer.
La famille ne cesse de s’agrandir, rejoignez le mouvement, nous vous accueillerons les bras ouverts ! L’histoire ne finit pas là !