Le Président du bureau national MIHARI, élu en juillet 2017 au Forum National de Fort-Dauphin, raconte son histoire dans Ocean Witness (En anglais ICI)
Hermany EMOANTRA est né et a grandi dans un petit village côtier du Sud-Ouest de Madagascar et l'océan a toujours occupé une grande place dans sa vie. Il est aujourd'hui le président du Réseau MIHARI ( le réseau national des Aires Marines Gérées Localement à Madagascar), un réseau qui ne cesse de grandir : déjà 17% des mers de Madagascar sont désormais sous gestion locale. Aujourd'hui, nous (Ocean Witness, N.D.L.R.) partageons son histoire.
Vous avez grandi dans un petit village côtier, vous devez donc avoir de nombreux souvenirs de l'océan. Que pouvez-vous partager avec nous sur vos premiers souvenirs?
Je me souviens que la première fois que mon père m'avait amené en mer, j'avais huit ans à l'époque et nous avons vu un énorme gastéropode marin! Il était énorme et d'un rouge brillant, et j'étais absolument fasciné. Je n'oublierai jamais ce moment.
Que signifie l'océan pour vous aujourd'hui?
L'océan signifie beaucoup pour moi. Quand j'étais pêcheur, c'était un peu comme mon bureau et j'allais y travailler tous les jours. Je l'aime aussi pour les bénédictions qu'elle nous donne et pour les écosystèmes fascinants qu'elle contient. Mon aventure dans la conservation marine a commencé il y a plus de dix ans. J'ai rejoint la LMMA FIMIMANO, qui comprend Anakao, à Madagascar, parce que je voulais m'impliquer davantage dans la protection de nos ressources marines.
Vous avez donc vu l'océan de différents points de vue : ayant été enfant, puis pêcheur et maintenant défenseur de la nature. Quels changements avez-vous observé dans l'océan?
Outre la pêche destructrice et la surexploitation, l'un des plus grands changements que j'ai vus dans ma vie est la dégradation progressive des coraux, et je sais que cela est dû en partie au changement climatique. Je m'inquiète du déclin de ces écosystèmes cruciaux, car cela affectera nos captures, et nos moyens d'existence et nos familles en dépendent.
“Je crois fermement aux avantages du travail collaboratif pour protéger nos ressources marines. En travaillant ensemble, les pêcheries artisanales de Madagascar peuvent devenir durables.” Hermany Emoantra
Et que faites-vous personnellement (ou en tant que communauté) pour contribuer à changer cela de manière positive?
Je crois fermement aux avantages de travailler ensemble pour protéger nos ressources marines, et MIHARI nous aide à apprendre les uns des autres et à prendre des décisions ensemble. Je voulais contribuer à l'augmentation de l'efficacité des LMMA au-delà de FIMIMANO, j'ai donc présenté ma candidature à l'élection du président en 2017. En tant que président du réseau MIHARI, je peux dialoguer avec les autorités régionales et nationales au nom des LMMA de Madagascar. J'espère que cela sera beaucoup plus facile pour moi de transformer les idées en actions, de plaider en faveur du changement au niveau national, et je m'efforcerai de développer le Réseau MIHARI et de résoudre les problèmes qui affectent les communautés de pêcheurs du pays.
L'une des activités que nous menons au sein de la LMMA FIMIMANO est d'éduquer les pêcheurs sur les raisons de ne pas utiliser des techniques de pêche destructrices telles que le latex toxique du laro. Ce type de technique cause la mort de nombreux poissons et autres organismes dans l'océan et n'est définitivement pas durable. Il sera difficile d'abolir les pratiques de pêche destructrices avec uniquement la formation et l'éducation, mais nous espérons que nous verrons une baisse de ces pratiques dans nos communautés. Je pense que ces techniques néfastes sont surtout pratiquées par de gens qui n'étaient pas pêcheurs à l'origine, mais qui ont décidé de commencer à pêcher parce qu'ils n'ont pas d'autres activités. Ils ne connaissent pas l'océan, ni les raisons pour lesquelles ces pratiques sont destructrices.
17% des mers de Madagascar sont désormais sous gestion locale grâce au mouvement grandissant des LMMA, mais nous continuons. Je sais que de nombreux défis attendent le réseau MIHARI, mais je crois fermement qu'en travaillant ensemble, la pêche artisanale à Madagascar peut devenir durable.
"17% des mers de Madagascar sont désormais sous gestion locale grâce au mouvement grandissant des LMMA, mais nous ne nous arrêterons pas là."
Merci d'avoir partagé votre histoire! Que veux-tu dire aux autres "Témoins de l'Océan" ?
Je crois que nous devons soutenir les communautés qui dépendent financièrement de la mer. C'est le message que je veux partager avec mes collègues dans le monde entier. Nous devons soutenir la création de moyens de subsistance alternatifs et d'opportunités éducatives pour donner plus de choix à plus de personnes, et nous devons arrêter les dégâts causés aux écosystèmes marins par les pratiques de pêche destructrices.
Si nous pouvons faire tout cela, il y a une chance que nos stocks de poissons ne diminuent pas autant qu'ils le sont maintenant, et que les générations futures puissent vivre de façon durable.
A propos de Hermany
Hermany Emoantra Manahadraza est né et a grandi dans le village côtier d'Anakao au Sud-Ouest de Madagascar. Sa famille est Vezo, les pêcheurs traditionnels de la région, donc l'océan a toujours été une grande partie de sa vie. La relation que les Vezo entretiennent avec l'océan commence dès la naissance, les parents plaçant souvent le placenta de leur nouveau-né dans une coquille et le jetant dans l'océan, pour que plus tard, il n'ait pas le mal de mer. Les enfants Vezo apprennent aussi à pêcher dès leur plus jeune âge. Hermany a aujourd'hui 56 ans, il est marié et est père de six enfants, et de nombreuses années de pêche à son actif, mais il est également le président du réseau MIHARI, le réseau des aires marines gérées localement à Madagascar.
Lisez la version en anglais sur Ocean Witness