L'isolement et le manque d'infrastructures sont des défis majeurs pour les communautés côtières qui gèrent les ressources marines à Madagascar. Il en résulte un accès limité ou inexistant aux services de santé de base, qui est un droit humain fondamental. La gestion durable des ressources marines est difficile à réaliser lorsque les gens ne sont pas en bonne santé. MIHARI, le réseau de communautés côtières de Madagascar qui régit les zones marines gérées localement (LMMA), est en liaison avec les partenaires de la santé pour aborder cette question.
Les défis des LMMA en qui concerne la santé
Les LMMA sont des aires marines gérées par les communautés côtières, et se trouvant, la plupart du temps, dans des zones très isolées. Cet isolement, conjugué à une infrastructure de transport limitée, restreint souvent la capacité des prestataires de services de santé à atteindre les communautés locales et peut diminuer la qualité des services fournis. L'Organisation Mondiale de la Santé reconnaît cependant que l'accès à des informations précises sur la santé et à des soins de santé de qualité est un droit fondamental: « Le droit à la santé comprend l'accès en temps opportun à des soins de santé de qualité et d'abordabilité suffisants. »
Les besoins non comblés en matière de santé communautaire peuvent restreindre la capacité des membres de la collectivité à faire de l'engagement dans les efforts de gestion une priorité. Dès lors, MIHARI estime que les personnes en bonne santé peuvent contribuer à des écosystèmes sains.
Lahiniriko Yolaude Jean René, Président d'une LMMA à Anakao, dans le Sud-Ouest de Madagascar, nous relate la situation dans sa région :
« Il n'y a pas assez de médecins. En ce qui concerne Anakao, il n'y a qu'un CSB (centre de santé publique) avec des sages-femmes, mais pas de médecins. Il y a aussi un manque en médicaments, donc les gens doivent aller en ville, à Tuléar pour accéder au traitement. A la voile cela prend quatre ou cinq heures, en bateau à moteur, trois heures. La plupart des gens doivent faire ce périple pour obtenir un traitement, en particulier ceux des petits villages qui n'ont pas de prestataires formels de services de santé pour tous. C'est un problème très important pour les communautés côtières. Les gens meurent en essayant d'accéder aux services de santé. »
MIHARI est un réseau de communautés et de leurs organismes d’appui qui gèrent les ressources marines et côtières. Le réseau existe pour appuyer les communautés dans leurs efforts de gestion, mais il n'a pas d'expertise en matière de promotion de la santé communautaire. MIHARI s'associe donc à un autre réseau qui peut aider les membres de MIHARI. Cela permettra d’accroître l'accès à l'information et aux services de santé dans les LMMA et aux alentours et contribuera ainsi à la durabilité des efforts locaux de gestion des ressources marines, tout en améliorant la santé des communautés LMMA. Cet autre réseau est spécialisé dans le rapprochement des organisations de la santé et de l'environnement pour mettre en œuvre des initiatives conjointes.
Une solution intersectorielle
Santé-Population-Environnement (SPE) est une approche holistique qui reflète les liens entre les personnes, leur santé et l'environnement. Il intègre la planification familiale et les autres services de santé aux efforts communautaires de gestion des ressources naturelles, souvent par le biais de partenariats intersectoriels, pour parvenir à un développement durable.
Madagascar compte parmi les endroits dans le monde où nous pouvons trouver les caractéristiques qui inspirent une approche SPE. L'île possède une biodiversité très riche et plus de la moitié de la population vit à moins de 100 km des côtes qui sont situées dans des endroits éloignés et difficiles d'accès pour les prestataires de services de santé. Après une riche histoire des initiatives SPE à Madagascar, le réseau SPE a été créé en 2014 pour relier les organisations de la santé et de l'environnement dans le but d'avancer des partenariats SPE à travers le pays. De nombreux membres du réseau SPE sont également membres de MIHARI et les deux réseaux collaborent maintenant étroitement pour aider leurs membres à travailler main dans la main pour accroître l'accès aux services de santé dans les LMMA et aux alentours et pour intégrer les efforts de promotion de la santé communautaire dans les activités de sensibilisation à l'environnement.
Natasha, membre de la communauté LMMA de Antanimanimbo, près de Belo sur Mer, sur la côte Ouest de Madagascar, témoigne des changements apportés dans sa vie quotidienne, par une initiative SPE :
« Depuis que j'ai commencé à utiliser la planification familiale, mon ménage fonctionne bien et je suis capable de faire des activités qui génèrent des revenus pour ma famille. »
Des résultats similaires ont été observés dans le LMMA de Velondriake, sur la côte Sud-Ouest de Madagascar, où Blue Ventures, membre du réseau MIHARI, a mis en œuvre une initiative SPE avec des partenaires de la santé, depuis 2007. Le directeur médical de Blue Ventures, Dr Vik. Mohan raconte l'histoire d'Irène, du village de Tampolove :
« Parce qu’elle a pu retarder la venue d’un autre enfant jusqu'à ce qu'elle soit prête, Irene a été capable de s'engager dans l'agriculture des algues et de gagner un revenu. Elle est maintenant en mesure de subvenir aux besoins de son fils et de payer ses frais de scolarité, et cette indépendance économique a grandement renforcé sa confiance. Elle est une ardente défenseuse de la planification familiale dans son village, où nous voyons de plus en plus de femmes s'impliquer dans des efforts de gestion des ressources marines. ”
La proportion de femmes qui utilise la contraception dans le LMMA de Velondriake a plus que quintuplé depuis 2007 et atteint à ce jour plus de 55%. La proportion de femmes représentantes au sein de l'Assemblée générale de Velondriake, chargée de gérer le LMMA, est passée de 13% à 38% selon les récentes élections communautaires.
Collaboration entre les réseaux MIHARI et SPE
Cette année, le réseau SPE a été invité par MIHARI à participer à aux forums régionaux qu’il organise. Le but de cette invitation a été de favoriser la collaboration entre les membres du réseau SPE et MIHARI et, de mettre en évidence la notion de liens inextricables entre la santé humaine et la santé des écosystèmes.
Nantenaina Andriamalala, agent de sensibilisation, a constaté que cette participation aux forums a été bénéfique dans la sensibilisation des organisations de conservation et des communautés LMMA sur l'approche de SPE :
« J'ai apprécié les forums. Ils ont donné l’opportunité de se partager les expériences, de confronter les idées et de trouver des solutions aux problèmes communs des LMMA. Grâce aux forums MIHARI, le réseau SPE a pu informer les ONG partenaires du réseau MIHARI des avantages de l'approche PHE et de l'existence de notre réseau. Ces événements ont permis de relier les partenaires de la santé à des organismes de conservation. En effet, nous avons invité de nombreux partenaires de la santé aux forums pour présenter les services et les possibilités de collaboration qu'ils peuvent offrir. »
Il a également souligné l'objectif global de cette vision intersectorielle :
« Avant tout, l'objectif principal de la participation aux forums a été de sensibiliser les communautés que lorsqu’on parle de conservation, il est nécessaire d'avoir une vision plus complète et d'aborder les liens inextricables entre la santé communautaire et l'environnement. Les communautés sont bien conscientes de ce qui leur arrive, mais le défi consiste à relier leurs efforts de conservation à la promotion de la santé. De nombreux partenaires sont venus aux forums, y compris PSI, Mahefa Miaraka et Marie Stopes Madagascar. Le réseau PHE peut encourager les partenaires sanitaires à collaborer avec les membres de MIHARI et à permettre à MIHARI de s'ouvrir à d'autres horizons que la conservation de part les caractéristiques intersectorielles du réseau SPE. Grâce aux forums, nous avons été en mesure de mieux comprendre les problèmes de santé auxquels sont confrontées les communautés LMMA. »
Par ailleurs, Vatosoa Rakotondrazafy, coordinatrice nationale du réseau MIHARI, souligne l'importance de travailler avec le réseau SPE pour atteindre les objectifs de MIHARI :
« Très souvent, les attentes des gestionnaires de LMMA pour MIHARI vont au-delà des champs d'action du réseau, comme par exemples la construction d'infrastructures, le don d'équipement et l'accès croissant à l'éducation ou les services de santé. Conscient que la conservation et la santé de la communauté vont de pair, nous sommes heureux d'être en contact avec le réseau SPE pour voir comment les communautés LMMA peuvent être informées et accéder à leur droit à la santé. »
Les forums constituent assurément la première étape vers une collaboration à long terme. Les prochaines étapes seront pour le réseau SPE de relier les partenaires de la santé aux communautés LMMA, de faciliter les partenariats entre les organismes de santé et les organismes de conservation qui soutiennent les LMMA au sein du réseau MIHARI et d'encourager l'incorporation de nouveaux éléments dans le champ de travail de MIHARI. Cela sera effectué dans le but de relever les défis auxquels font face les communautés LMMA.
Les forums constitue assurément la première étape vers une collaboration à long terme. Les prochaines étapes seront pour le réseau SPE de relier les partenaires de la santé aux communautés LMMA, de faciliter les partenariats entre les organismes de santé et les organismes de conservation qui soutiennent les LMMA au sein du réseau MIHARI et d'encourager l'incorporation de nouveaux éléments dans le champ de travail de MIHARI. Cela sera effectué dans le but de relever les défis auxquels font face les communautés LMMA.